Coup de croc
Rouen, le 27 mars 2017
Chère assurée,
Notre Pôle de Gestion nous a transmis le dossier relatif au sinistre du 13/03/17 dont nous poursuivons la gestion.
Les éléments en notre possession établissent l'entière responsabilité de votre adversaire dans cette affaire. Votre préjudice vous sera donc intégralement réglé.
Par ailleurs, cet accident a eu des conséquences corporelles.
Nous vous souhaitons le meilleur rétablissement possible.
Au-delà d'un certain âge, ça serait bien de faire tester les capacités à la conduite automobile (vue, ouïe, réflexes, fonctions cognitives). C'est une affaire de sécurité publique qui devrait être prise enfin en considération sans que cela devienne exclusivement l'exploitation d'une nouvelle manne pour l'Etat et les auto-écoles.
Les compagnies et mutuelles d'assurance commencent à faire le tri parmi leurs clients. Parce que ces derniers ne sont pas rentables et déclarent trop de sinistres. En bref, c'est encore une histoire de pognon avant tout. Ce n'est pas par préoccupation devant la dangerosité de certains qui iront s'assurer ailleurs.....ou pas. Combien de chauffards roulent aujourd'hui sans assurance ? Combien de potentiels assassins conduisent sous l'emprise de l'alcool, de stupéfiants, de médicaments induisant des troubles de la concentration ?
Qui s'en soucie vraiment ? Les familles de victimes, les victimes elles-mêmes. Après coup. Dans ce domaine comme dans bien d'autres, on pense que "ça n'arrive qu'aux autres". Cette insouciance prend fin le jour où la malchance change de cible, quand elle vient vous frapper de plein fouet.
Qui se sent le courage de dire à un proche : "Faut vraiment que tu arrêtes de conduire, tu es trop dangereux" ? Un de mes anciens voisins a décidé de lui-même d'arrêter la conduite. A 92 ans. Parce qu'il se faisait peur au volant de sa voiture estampillée d'un macaron "handicapé".
La femme de 72 ans que j'ai "rencontrée" de manière violente aura-t-elle cette lucidité tardive mais salvatrice ? Aura-t-elle seulement entendu le conseil des policiers ? Aura-t-elle tiré la leçon de cet accident avant d'en connaitre un autre plus dramatique ? Vu le profil et le discours de celle-ci, sortie indemne de l'accident, j'en doute.
Pour ma part, je cogite tout en me rétablissant des blessures légères pour lesquelles j'ai tout de même fait un passage aux urgences de l'hôpital. Je ne me sens en sécurité qu'au jardin avec le chant et le ballet des oiseaux. Au pire, je risque juste de me prendre une fiente sur le museau. En résumé, ce n'est pas ce genre de rencontre percutante qui va me réconcilier avec le genre humain.
C'était mon coup de croc du jour.