Grande Solitude Momentanée
On a presque tous de nos jours un téléphone portable. Il y a encore une poignée d'irréductibles qui n'en veut pas.
Il existe un large éventail de modèles avec des fonctions différentes et multiples. La technologie évolue si vite qu'on en est tenté d'en changer régulièrement. Le mien n'est pas de la toute dernière génération, bien que compatible 3G quand même. Je lui demande juste d'être opérationnel pour recevoir et émettre des appels. Je me contente de sa fonction première : téléphoner. Pour le reste, il y a d'autres équipements adéquats. Pour faire des photos, j'ai un APN. Pour écouter la musique, j'ai un lecteur. Pour surfer sur le Net, j'ai un ordi. Etc.
Papouf a longtemps été anti-téléphonie mobile. Il était hors de question qu'il s'en équipe. Aujourd'hui, en raison de sa profession et de ses nombreux déplacements, il a un Blackberry... qui fait GPS, entre autres. J'avoue que c'est bien pratique mais dans ma bagnole j'ai pris l'habitude de me débrouiller avec les bonnes vieilles cartes routières et de demander mon chemin aux gens. Enfin bref, en tout cas, Papouf est désormais conquis. Il en a même équipé tout le monde dans sa société depuis, faisant bien des heureux. Si on m'avait dit ça il y a dix ans.... j'aurais cru à une farce ! Je l'ai tellement tarabusté pour qu'il s'en achète un. Quand je l'ai connu, cela faisait deux ans que j'avais un GSM qui me permettait de tchatcher allègrement avec mes copines.
Vous vous souvenez des premiers GSM ? Ils étaient encombrants, avec une antenne. J'avais un dinosaure de ce style :
Le truc que vous pouvez difficilement oublier sur un coin de table sans vous en apercevoir. Déjà, rien que le (grand) sac à main paraît d'un seul coup hyper léger ! J'avais tapé du pied et fait un caprice d'enfant gâté auprès de mon ex-mari pour en avoir un. Lui, connaissant ma langue bien pendue, avait d'abord refusé tout net car il voyait déjà se profiler à l'horizon des factures pharaoniques. Un incident était survenu un jour et avait joué en ma faveur. Alors que nous étions arrêtés au feu rouge sur la RN10 à hauteur de Coignières à l'ouest de Paris, nous avions été témoins d'un passage à tabac d'un conducteur par une bande de gitans armés de battes de baseball et de barres de fer. Nous avions alors voulu alerter les secours mais impossible de trouver un téléphone sur le bord de la route. Le lendemain, j'avais mon GSM. J'avais fait la promesse de me montrer raisonnable, de ne pas multiplier ni faire durer mes communications.
Un jour, alors que je sortais d'un centre de magasins d'usines après une méchante virée shopping pour la carte bancaire, j'avais reçu un appel de ma copine Ingrid... tout aussi bavarde que moi. Elle venait aux nouvelles - je l'avais appeléle une heure plus tôt - voulait savoir si j'avais effectué des emplettes, trouvé ...mon bonheur.
Je m'étais installée dans la voiture stationnée en face une pizzeria du centre commercial et j'avais fait l'énumération de mes achats avec moults détails.
- Tu verrais ce petit haut ! Oh et puis, ce petit ensemble de lingerie ! A tomber par terre. J'te dirai s'il fait de l'effet. HIHI Par contre, j'ai essayé le pantalon noir, tu sais celui qu'on avait vu l'autre jour... mais si vachement moulant. Dans la vitrine à côté du magasin de sacs. Tu vois lequel ? ...Non avant la bijouterie...Non après le pressing. Voila ! Bon ben je l'ai passé eh ben tu verrais le popotin que ça me fait. Ca poche, c'est moche. Et puis au niveau des cannes, ça me boudine. Ah non l'horreur, j'te jure !
Et nous avions continué ainsi à blablater, ricaner, glousser, râler. Et puis la discussion avait soudain bifurqué sur nos trois pièces intimes respectifs. Nos histoires d'ovaires et de trompes, de cycles menstruels, de visites chez le gynéco. Nous en étions à évoquer la consistance et durée de nos dernières ragnagnas quand une serveuse de la pizzeria était venue frapper à la vitre de ma portière. Avec un air hilare et gêné à la fois.
-Excusez-moi Mademoiselle (qu'il est loin le temps des "mademoiselle" LOL) mais je voudrais vous signaler qu'on entend tout ce que vous dites dans le restaurant. Et comme là ça devient vraiment ...hum
Grande Solitude Momentanée. Gros Silence Me'dique . J'avais prestement raccroché au nez d'Ingrid.
On ne se méfie jamais assez de ces mauvaises ondes... hertziennes et des indiscrétions. Dorénavant mes copines et moi, on se partage nos petits secrets ... dans une cage de Faraday ! LOL