Page 209

Je suis actuellement en train de lire le thriller d' Olivier Bocquet, intitulé "Turpitudes". Lauréat du premier prix Thriller Mania.

Hier soir, avec toujours le même plaisir de lire et l'envie de connaitre la suite, je m'arrête à la page 209 où le personnage "Eva" s'interroge sur l'image qu'elle peut renvoyer aux autres. Je lis le passage une deuxième fois. Il m'interpelle, m'amène à me questionner, à réfléchir sur certaines situations vécues, sur des personnes que je côtoie ou que j'ai côtoyées. Il me conduit à une introspection, à me demander si je ne suis pas aussi quelque part une coquille vide. Je choisis de stopper ma lecture du soir sur cette page, de poser le livre, de rester un moment les yeux rivés sur le mur d'en face, l'esprit bouillonnant. Quelques instants plus tard, en paix avec moi-même face à mes juges, je plonge dans un sommeil profond et réparateur.   

---

209

Qu'est-ce que vous feriez-vous, si d'un seul coup vous appreniez que les gens vous voient différemment de ce que vous pensiez ? Si tout ce que vous considériez comme vos meilleures qualités était en fait perçu comme vos pires défauts par l'ensemble de vos amis, par votre famille ? Est-ce que ça n'est pas totalement effroyable de se rendre compte qu'on a aucune prise sur ce que les gens pensent de soi ? Aucune vérité ? Et qu'il en sera toujours ainsi ? Quand j'entends le mal que les gens disent des autres ... Pour quelle raison est-ce que j'échapperais à ça ? Aux ragots, aux commérages, aux coups de poignard dans le dos ?

Du coup, je regarde tout le monde d'un autre oeil. Je perçois les doubles sens qui n'en sont sans doute pas, j'interprète les regards ou les intonations. Et ça me rend ridicule : je m'observe, je suis si attentive à ne pas avoir l'air fausse qu'évidemment je le deviens ! Tout à l'heure, je suis allée voir des copines. Je leur avais promis un gâteau et je suis venue les mains vides. Pourquoi ? Parce que j'ai pris conscience que faire des gâteaux c'est juste acheter de la reconnaissance. J'attends qu'on s'extasie, qu'on me remercie, qu'on me demande ma recette... Ca me valorise. Je dis toujours que j'aime faire plaisir, mais en réalité, qu'est-ce que je cherche quand je fais plaisir ? Je cherche à être le centre de l'attention, je cherche la gratitude. On peut appliquer ça à tout. Aux SDF, au tiers-monde, aux enfants malades... Tout ce que je fais me vaut de la reconnaissance. Est-ce que je fais tout ça que dans ce but ? Dans son journal, ma fille a appelé ça ma raison sociale. Et si elle voyait juste ?

Je sais que ça n'a rien de nouveau, je ne prétends pas faire la découverte du siècle, on se pose tous ces questions, mais... Mais je ne sais pas, en ce moment, tout prend une importance démesurée. Je n'arrive pas à accepter. Je sais qu'il n'y a rien à faire, que c'est le propre des rapports humains ne pas être perçu ainsi qu'on voudrait l'être, je sais qu'on se demande toujours si les autres sont plus clairvoyants que nous. Mais s'ils le sont vraiment ? N'y a-t-il pas moyen d'agir ? De changer les choses ? D'être conforme à ce qu'on voudrait être ? Qu'est-ce que je dois faire ? Vous n'imaginez pas quelle torture ça a été d'affronter la déception de mes copines. Elles comptaient sur moi pour le gâteau. J'ai même cru déceler une pointe de réprobation et sûrement que je ne l'ai pas rêvée. Qu'est-ce qui se passerait si je n'amenais plus jamais de gâteau ? Est-ce qu'elles arrêteraient de m'inviter ? Est-ce que je veux perdre mes amies pour une simple histoire de gâteau ? Mais si un simple gâteau peut faire échouer une amitié, alors que vaut cette amitié ?

Comment est-ce que je vais pouvoir continuer comme ça ? Mon Dieu, je suis perdue, perdue ! Je ne sais plus qui je suis. Je croyais le savoir, je croyais être une femme bien, comme on dit, mais ... mais je ne suis qu'une coquille vide.

---

Eh bien, je ne pensais pas que le contenu d'un thriller me ferait tant cogiter sur la nature humaine. Bien plus qu'un bouquin de Marc Lévy ! Ce n'est pas Antiblues qui me contredira sur ce point. (cf son billet d'hier )

Je tenais également à rassurer le G10 à propos du dessert que je dois amener à La Roubine. Je l'apporte toujours et.... certainement pas avec l'arrière pensée de monnayer votre amitié !

Comments

[ksenia]

Le sujet a été déplacé à jeudi en raison de l'actu et d'une "commande" faite par Antiblues.
Bises et merci pour ton comm' ! Quelle rapidité !

[emma]

as tu entendu france inter ce matin? l'émission d'ISabelle giordano? c'était aussi sur la charité et il parlait des spectacles des restos du coeur...

bon sinon , je crois qu'il y a un moment où il faut se faire confiance à soi.savoir se connaitre à sa juste valeur...ils vont t'adorer , j'en suis sûre!! et puis avec tes lunettes, tu vas détonner :))
je t'embrasse fort
j'adore les polars!!!
je note le titre et l'auteur :)